Saviez-vous que les gangsters italiens ont joué au cours des années 1920 à 1930, un rôle très important dans l’épanouissement et la diffusion du Jazz ?
Avec l’ouverture de nombreux night-clubs à New York, Chicago ou Kansas City, ils ont en effet permis aux musiciens noirs, longtemps réduits à l’état de vagabonds, de travailler dans des conditions artistiques et financières décentes, leur offrant ainsi la possibilité d’épanouir leur talent de jazzmen. La pègre italienne, épaulée par le talent des artistes noirs, va alors jouer un rôle majeur dans l’explosion des activités de loisirs nocturnes à New York à partir des années 1910. À Harlem, par exemple, on trouve des établissements aussi prestigieux que le Connie’s Inn ou le Cotton club, dont les magnifiques revues sont animées par les orchestres de Duke Ellington et Cab Calloway.
Chicago s’affirme aussi comme une grande capitale du Jazz, avec ses magnifiques night-clubs tenus par la pègre, comme le Casino Gardens, le Lincoln Gardens, l’Apex club ou le club deluxe, lieux de rendez-vous de nombreux gangsters. On trouve notamment de nombreux clubs de jazz dans la banlieue de Cicero, fief d’Al Capone, ainsi que dans le South Side. Un des endroits les plus animés se situe alors à l’angle de la 35e rue et de Calumet Street, où voisinent le Sunset Cafe, le Nest, ou le plantation club, et où jouent à la fin des années 1920, quasiment porte à porte, Louis Armstrong et King Oliver.
Plusieurs gangsters parmi les plus célèbres, comme Larry Mangano et surtout Al Capone, semblent ainsi avoir éprouvé un amour sincère pour le Jazz, écoutant souvent avec attention les orchestres de leurs propres clubs. Dans les années de la prohibition, on peut nommer les musiciens qui ont profité de la manne de la pègre italienne : Duke Ellington, Cab Calloway, Billie Holliday, Bessie Smith… Avec la chute de Lucky Luciano, et à Chicago celle d’Al Capone qui est emprisonné pour fraude fiscale, cela provoque un exode des gangsters d’un nord-est devenu trop malsain pour eux et une réduction de leurs activités, entraînant la fermeture de beaucoup de leurs night-clubs, comme le fameux Cotton club en 1940.
Difficile d’imaginer Frank Sinatra, le crooner à la voix de velours, en mafieux ? pourtant, sous ses airs de gendre idéal, le chanteur entretenait des liens étroits avec la Cosa Nostra, tissés depuis l’enfance du chanteur dans le New Jersey, au cœur d’une communauté italienne. À ses côtés ? Lucky Luciano. Si de son côté, le chanteur a toujours démenti avec acharnement ses relations avec la mafia, à sa mort en 1998, le FBI rend publique une enquête de 1275 pages qui révèle, entre autres, comment la carrière de celui-ci aurait été soutenue à ses débuts par Willie Moretti, cousin du parrain Frank Costello et membre notoire de la mafia. Et, surprise, la cousine de l’un des hommes de main de Moretti n’est autre que Nancy Barbato, la première épouse de Sinatra. Alors sans la prohibition et les généreux gangsters, est-ce que le jazz aurait eu une reconnaissance si importante et internationale ?