#Jazz & #Soul Queen Of Soul !

Aretha Franklin, la « reine de la soul », incontestée, depuis près d’un demi-siècle a « replié son ombrelle » à Detroit en 2018, victime à 76 ans d’un cancer contre lequel elle luttait depuis plusieurs années. Cette si grande dame restera dans nos mémoires. Elle mérite bien l’hommage du Jazzophone.

Dès ses 14 ans, depuis l’église de son père, un pasteur proche de Martin Luther King (et qui échappa de peu à la mort pour cette raison), elle s’affirme, sur les traces de Ray Charles, comme l’une des personnalités  les plus importantes du monde musical. Avec 18 Grammy Awards (et 44 nominations), elle aurait vendu plus de 75 millions de disques vinyles (dont 2 millions pour l’album de gospel « Amazing Grace »).

Militante déterminée des luttes civiques et des droits des femmes, elle émut aux larmes et fit fredonner Barack Obama lors de la cérémonie d’hommage à Carole King, l’auteure de « You make me feel like a natural woman ».

Pourtant, peu d’entre nous l’auront entendue en concert, car elle n’est venue que rarement en Europe, à cause, dit-on, d’une peur phobique des voyages en avion. Une vidéo diffusée dernièrement par Arte la montre à Amsterdam en 1968, lors de sa première sortie hors des États-Unis.

Sa discographie signale un « Live in Paris » la même année et  les archives notent sa présence au Festival d’Antibes Juan-les-pins en juillet 1970.

Heureusement, personne n’aura  oublié sa prestation dans « The Blues Brothers », le film de John Landis sorti en 1980.

En pleine gloire, trois soirs durant, les 5, 6, et 7 mars 1971, elle était au Fillmore East de San Francisco (où Miles Davis venait juste d’enregistrer un live), le temple des musiques nouvelles fondé par l’impresario visionnaire Billy Graham. Un album de 4 Cds chez Rhino en édition « Deluxe » (introuvable…) en témoigne. Deux vinyles originaux et « légendaires » se sont vendus à plus de 5000 exemplaires.

Dans le premier, King Curtis (ts) excelle à « chauffer » la salle en attendant Aretha. Billy Preston (B3), Cornell Dupree (g), Truman Thomas (p), Jerry Jemmott (b),  Bernard Purdie (dm) et Pancho Morales (perc), les « Kingpins », tous ex ou futurs compagnons de Miles Davis, Horace Silver, Archie Shepp, Steely Dan, Duane Allman, BB King, Freddie King, Éric Clapton, Les Beatles, Les Stones… canalisent les fulgurances d’une section de cuivres phénoménale : les « Memphis Horns » : Wayne Jackson et Roger Hopps (tp) Andrew Love et Lou Collins (ts), Jimmy Mitchell (bs) et Jack Hale (tb). Alternant les morceaux rapides et les ballades, de « Memphis Soul Stew » à « Soul Serenade », c’est un festival de funk torride dans le quartier hippie de Haight Hashbury, capitale  du « Flower Power movement » qui réclamait,  entre autres, la fin de la guerre au Vietnam…

Dans le second vinyle, tout aussi dynamique, dès « Respect », son morceau de bravoure pris à un tempo de folie,  ils se mettent au service d’Aretha Franklin souvent au piano Fender (sur Eleanor Rigby, Don’t play that song, Dr Feelgood et Spirit in The dark).

Soutenue par les voix de ses « Sweathearts of soul » (Brenda Bryant, Margaret Branch et Pat Smith), elle livre un show extraordinaire de fraîcheur et de spontanéité. Quand on n’entend plus son piano (ou qu’elle n’est pas remplacée par Truman Thomas), c’est qu’elle est en train de danser sur la scène ou au milieu des spectateurs, jouant d’une palette vocale, riche de… quatre octaves.

Vers la fin du concert  elle s’esquive dans les coulisses pour en revenir, triomphante, bras dessus, bras dessous avec… Ray Charles… Il s’ensuit une  jam-session extraordinaire, quasi miraculeuse entre ces deux génies de la soul. Totalement impromptu, ce « faux bis » d’une vingtaine de minutes est un modèle d’improvisation (certes, sur seulement deux accords) et d’adaptation de  l’orchestre de King Curtis à ce qui se créait dans l’instant. Le vinyl en donne une version renversante, mais, semble-t-il, un peu tronquée. Une vidéo de YouTube (Aretha Franklin & Ray Charles – Spirit in the dark) s’interrompt, hélas, au moment où Ray Charles après avoir chanté et dansé debout à côté d’Aretha, et multiplié mots et gestes d’affection à son égard, est invité par elle à se mettre au piano… On n’en verra pas davantage, mais, amis lecteurs, vous savez ce qu’il vous reste à faire… « À vos cassettes » aurait dit Jean-Christophe Averty, grand divulgateur du jazz du  temps de l’ORTF, qui se réjouirait de l’usage que vous n’allez pas manquer de faire des téléchargements…

https://arethafranklin.net

Ecrit par Daniel Chauvet
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