#PORTRAIT : RHODA SCOTT : Booste le Lady All Stars

 

Insatiable, la plus française des musiciennes américaines ! Et quel chemin parcouru depuis son enfance où sur les genoux de sa mère elle écoutait les sons magiques de l’orgue dans l’église paroissiale et au côté de son père face à l’orgue Hammond.

La jeune fille est curieuse et pressée d’apprendre la musique de jazz car pour l’instant elle baigne dans le gospel, le négro spiritual et les chants religieux. Un peu plus tard elle s’intègre à des groupes de rythme and blues. Un jour les sonorités de Rhoda Scott résonnent aux oreilles d’un grand du jazz : Count Basie qui l’invite à jouer à ses côtés. En même temps elle est une étudiante studieuse, au point de parfaire son éducation musicale…en France… Elle rencontre Nadia Boulanger et surtout le monsieur musique de jazz et de variétés de l’époque : Eddie Barclay, il sent la pépite ! Elle va enregistrer, faire l’Olympia, habiller par le couturier Yves-Saint-Laurent et en devenant la coqueluche des clubs de jazz où on reprend son premier tube Hey, Hey, Hey. La route est tracée, devenue une star du jazz elle partage son temps entre les U.S.A et la France. Le coup de foudre pour notre pays ne s’arrête pas là, elle épouse l’acteur Raoul Saint-Yves et s’établie dans l’Orne à Coulonges les Sablons. Les années passent, la belle dame ne lâche pas l’instrument aux deux claviers, aux dizaines de boutons qu’elle doit pousser et tirer, et bien sûr ce fameux pédalier qui lui donnera ce surnom « la dame aux pieds nus » et selon une légende dû à un musicien… elle a l’orteil absolu. D’un fou rire Roda Scott aime raconter l’anecdote : « Dans l’église où jouer mon père il y avait un orgue tout neuf, en lui demandant de le tester il me recommande d’y faire attention et de ne rien abîmé, quand j’ai vu le pédalier tout beau j’ai trouvé logique d’enlever mes chaussures, afin de ne pas user les pédales. Depuis j’ai pris l’habitude de jouer pieds nus ».

Pour l’instant elle n’a pas usé le pédalier mais elle a su trouver toutes les possibilités qu’offre ce troisième clavier pédestre. Ce long travail de recherche musicale a fait que par exemple le résultat final peut-être comparé à celui du premier grand monsieur de cet instrument, Jimmy Smith qui lui avait par contre tendance à « garder la note » pourrait-on dire à l’image de ce qu’on pourrait entendre dans les églises, Roda Scott elle, fait jaser son pédalier. La diva pourrait prendre sa retraite mais l’instinct de créer prend le dessus avec son groupe récent du LADY ALL STARS qui réunit les meilleurs instrumentistes du Jazz du moment. (1)

Roda Scott : « Je sens un renouveau en moi en écoutant ces jeunes musiciennes, c’est dans l’air du temps, la parité. Mais j’ai joué avec les hommes toutes ma vie et grâce à eux j’ai eu du succès, je pense en avoir avec les femmes, chacune d’entre elles est une vedette à part entière. Ensemble on apporte une énergie, un dynamisme qui ne cesse de plaire, je suis sûr que depuis que je joue avec ces femmes elles m’ont apportées de nombreuses idées et de suggestions de morceaux, elles ont composé elles-mêmes pour notre groupe et ça m’a vraiment ouvert des horizons ».

Vous êtes plus intéressé par le phrasé des chanteurs que par les musiciens ?

Roda Scott : J’aime la mélodie, je trouve que les belles mélodies ça transporte, comme celle par exemple de Frank Sinatra, Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald. C’est elles qui vous aident à donner le rythme à ce que vous jouez, je pense que mon oreille chante pour moi.

En dehors de la musique que faites-vous ?

Roda Scott : Je fais beaucoup de lectures, je lis en ce moment un livre que j’ai offert à toutes les femmes du groupe, un ouvrage de Richard Strauss où il a écrit ses impressions sur l’Opéra. Deux autres livres m’intéressent, celui d’Oliver Sachs et l’autre Music Ophélia, écrit par un neurologue qui s’intéresse à des effets phénomènes de la musique sur les musiciens. »

Désormais, la cheffe des Ladies à déménager au Mans où elle joue de l’orgue dans l’église de la ville quand elle n’est pas en tournée. Récompensée par une Légion d’Honneur ; Commandeur des Arts et des Lettres, elle garde un bon souvenir du Perche où les expressions locales l’amusaient beaucoup… « Par exemple, EH BEN DIS DONC ! Bon élève j’ai conservé la traduction cela veut dire simplement OH LALA ! C’est un peu pour exprimer sa surprise. »

En attendant de traduire les secrets du patois du Mans cher à la culture française Roda Scott travaille sur des nouvelles compositions pour son groupe.

Sophie Alour, Géraldine Laurent, Céline Bonacina, Lisa Cat-Berro aux saxophones. Anne Paceo & Julie Saury à la batterie. Airelle Besson à la Trompette

Ecrit par Jean-Pierre Lamouroux

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