Ce soir, nous continuons l’exploration du jazz serbe avec à 18h au temple, l’accordéoniste Marko Živadinović, puis après une petite migration vers les carrières, le Majamisty Trio, enfin la célèbre Ana Popovic en sextet.
Une heure de pur plaisir, de balades, d’histoires racontées par Marko Živadinović et son accordéon. Il nous raconte sa maison, ses amis, son pays grâce à ses compositions originales qui plongent tout à la fois dans les racines des musiques populaires, dans des citations plus classiques et bien sûr des références subtiles au jazz.
L’accordéon n’est pas que l’instrument de la mélancolie et de Dana à Song For My Friends en passant par No Problem Song, le musicien nous offre un éventail de rythmes et de mélodies variées qui s’enchaînent avec fluidité. Un moment de grâce lorsque Lou Prigent, l’une des organisatrices du festival se joint à l’accordéoniste pour un A Vava Inouva – une chanson du chanteur kabyle Idir – que tout le monde fredonnera.
C’est cela aussi, Jazz à Junas, la proximité entre les festivaliers et les artistes, cette connivence, cette amitié qui scellent ces soirées festives. Des applaudissements nourris pour ce set, Marko Živadinović a su toucher un public qui n’est pas près d’oublier sa prestation.
L’élégance est au rendez-vous pour le premier concert de la soirée dans le site des carrières, Majamisty Trio s’installe : au piano et aux compositions Maja Alvanović, à la contrebasse Ervin Malina et Lav Kovač à la batterie, nous profiterons aussi des compositions de ces deux derniers musiciens.
Assez loin des influences actuelles jazzistiques, les trois artistes nous emmènent dans un univers original, qui plonge dans une formation classique, cela se ressent au toucher délié et subtil du piano, aux incantations qui donnent le rythme de la contrebasse et à la délicatesse soyeuse du batteur,
qui habille, avec le contrebassiste, les envolées solaires du piano, avec des couleurs chaudes, construisant un jazz que l’on pourrait qualifier d’intellectuel, mais que partage avec beaucoup de sérénité et de charme ce trio. Une très belle découverte.
Et le public entendra distinctement le message de Maja Alvanović, dédiant un des morceaux aux étudiants et au peuple qui continuent à manifester à Belgrade et dans bien d’autres villes. L’audace des organisateurs de faire venir ces formations, qui peuvent s’exprimer de multiples manières.
22h30 : les carrières s’illuminent, pas seulement grâce aux magnifiques éclairages qui habillent les vieilles pierres. Les musiciens de Ana Popovic s’installent sur la scène : méthode américaine, chauffer la salle avant l’arrivée de la vedette ; Buthel Burns à la basse, Michele Papadia, aux claviers Kwesi Robinson à la batterie, Claudio Giovanoli au saxophone enfin Davide Ghidoni à la trompette entament un morceau endiablé, électrique, enflammé
pour qu’apparaisse une sirène, à moins que ce ne fut une diablesse rouge, Ana Popovic armée de sa guitare électrique.
Blues, rock, tout se mêle avec bonheur, un sacré culot et une liberté totale au fil des morceaux puissants. Chaque musicien est au service des solos inspirés de la guitariste et les choristes Buthel Burns, Michele Papadia ainsi que Kwesi Robinson soutiennent la voix intense et évocatrice d’Ana Popovic.
Les morceaux célèbrent la vie, les luttes personnelles et collectives, la musique enfin, le partage que celle-ci procure, non seulement entre les musiciens mais aussi cette communion avec le public, très vite debout, pour fêter ensemble le live, le spectacle vivant, le bonheur d’être ensemble !
Les notes qui ont fait vibrer les carrières ce soir, mettront du temps pour disparaitre, longtemps après que la guitariste et le sextet aient quitté la scène. Vibrations qui perdurent encore certainement dans la tête des spectateurs, enthousiasmés par la soirée.