LE JAZZ ITALIEN : Pino Presti

Pour reprendre le discours sur le jazz Italien, cette fois ici j’ai choisi un personnage illustre qui habite ici à Nice sur la côte depuis plus d’une dizaine d’années, et dont le nom est Pino Presti, chef d’orchestre, arrangeur, producteur, mais surtout pour moi bassiste et copain…

Pourquoi dis-je bassiste ? Pas seulement parce que je joue de la basse (et je suis sensible à ce point) mais parce que Pino Presti a été un innovateur de la basse électrique avec sa Fender jazz bass 60, son ampli Ampeg B-15 et sa technique spéciale avec le médiator ou le pouce. Il a participé aussi à de véritables révolutions musicales comme le tango nuevo avec Astor Piazzolla. Avant d’en arriver là, allons voir qui est Pino Presti, et d’où il vient. Né à Milan, fils de Arturo Prestipino Giarritta un grand violoniste classique amateur de jazz, il a commencé l’apprentissage de la musique classique et le piano à l’âge de six ans. Il commence sa carrière de musicien professionnel à l’âge de 17 ans, au début des années 1960, à la fois en tant que chanteur-bassiste dans les clubs, et instrumentiste dans les studios d’enregistrement. Il enregistre des centaines de titres avec les plus grands artistes. Impossible d’écouter de la musique italienne des années 60/70 sans entendre à la basse Pino Presti, toujours présent avec les artistes les plus différents, très demandé dans tous les studios d’enregistrement pour son jeu de basse à la sonorité moderne, agressive et efficace, et sa capacité harmonique qui le rend très versatile pour tous les style de musiques.

Avec en plus la rapidité d’apprendre rapidement, et la capacité de lire tout suite une partition qui font de Pino Presti à cette époque le session Man le plus demandé sur le marché. Beaucoup de collaborations avec des jazzmen italiens comme Franco Cerri, il fait partie de son quintet au début des années 70, Enrico Intra qui l’appelle plusieurs fois pour ses disques de jazz d’avant-garde et ses tournées, Bruno De Filippi qui joue l’harmonica et la guitare dans ses productions, de même que le saxophoniste Gianni Bedori, le flûtiste Severino Gazzelloni avec lequel il fait plusieurs tournées, et qui est enthousiasmé de collaborer avec ce bassiste à la sonorité très moderne (si vous connaissez pas cette flûtiste dans le chef d’oeuvre « Out of lunch » de Eric Dolphy il y a un morceau qui s’appelle « Gazzelloni » en l’honneur de ce grand musicien). Et petit à petit, ses collaborations deviennent plus importantes et plus internationales, sur disque ou en concert live, de Shirley Bassey à Wilson Pickett, de Maynard Ferguson à Aldemaro Romero, de Quincy Jones à Bill Conti, de Astor Piazzolla à Gerry Mulligan. Dans les années 70, il commence son activité d’arrangeur et producteur avec Mina, la plus grand chanteuse italienne, avec beaucoup de succès internationaux comme « Grande grande grande », mais c’est une autre histoire… Il faudrait un livre pour traiter de leur collaboration…

Mina_smoking

Pour l’enregistrement de « Libertango » avec Astor Piazzolla, il apparait sous son vrai nom Giuseppe Prestipino, ainsi que dans les albums La Onda Màxima et Onda Nueva du pianiste, compositeur, arrangeur vénézuélien Aldemaro Romero. Très importants, les deux albums enregistrés avec Gerry Mulligan « Summit-Reunion Cumbre » de Gerry Mulligan et Astor Piazzolla pour célébrer la rencontre survenue en Italie en 1974 de deux des plus importants musiciens du XXe siècle, et « Mulligan meets Intra » avec le pianiste Italien Enrico Intra publié en 1976 aussi enregistré en Italie. Mulligan, dans un interview avec le journaliste et critique de jazz Nat Hentoff, a déclaré être très satisfait de sa collaboration avec les musiciens italiens pour la créativité et le niveau musical. Libertango, enregistré à Milan en 1974, c’est la révolution du tango traditionnel et de la liberté d’expression, et il détermine le passage du vieux tango acoustique à la liberté de jouer le tango nuevo en électrique, et la Fender jazz de Pino Presti a beaucoup contribué à ce changement.

En avril 1975, au cours de sa tournée européenne avec Mulligan et Piazzolla il joue également à l’Olympia (Paris) et au World Music Festival de Palma de Majorque. La formation était constituée de Gerry Mulligan (saxophone baryton), Astor Piazzolla (bandonéon), Tom Fay (piano), Pino Presti (basse), Tullio De Piscopo (batterie), Sergio Farina (guitare électrique), Waldo de los Rios (orgue). Gerry Mulligan effectuait la première partie du concert, Astor Piazzolla la seconde, et la troisième réunissait les deux artistes sur l’interprétation des thèmes de l’album Summit- Reunion Cumbre. Pino Presti a toujours utilisé une basse Fender jazz pour le live et les enregistrements, sauf petite exception pour une bass Guild short scale et un Gibson Eb-3 pour la recherche de sonorités différentes. Pino Presti vit en France ; à Nice depuis 2004 et continue à travailler dans la musique. En 2009 il a réalisé et produit le triple album A La Costa Sud (La Musique De La Côte D’Azur) (Edizioni Curci), avec différents chanteurs et musiciens qui se produisent habituellement sur la Côte d’Azur comme Jean Marc Jafet, François Chassagnite, Ronnie Rae, Scott Allen, Nina Papa… Et en 2013 il a produit l’album jazz de la chanteuse américaine mais niçoise d’adoption Shirley Bunnie Foy (60th Anniversary) pour la Map records. Une curiosité : Pino Presti est ceinture noire 5e Dan de karaté Shotokan. A bon entendeur…

 

Ecrit par Claudio Citarella

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