#Interview Arshid Azarine ou l’Homme au Double Cœur

Pianiste, compositeur, producteur de disques et organisateur de festivals, Arshid Azarine est avant tout un radiologue. Peu connu du grand public pour ses atouts artistiques, il est très réputé dans le milieu médical à l’échelle planétaire. Mais devant un patient ou sur une scène, il est toujours à cœur ouvert et offre tout son pouvoir en quête de miracles.

Son « acte inimaginable » (mission) fût le concert qu’il a organisé au New Morning de Paris le 4 novembre 2019. Un concert unique à l’occasion de la sortie de son nouvel album « Sing Me a Song » sur Ohrwurw records où il a eu le groupement le plus impressionnant de musiciens… et surtout les vocalistes iraniens toutes catégories pour magnifier le contenu de cet album et son message simple (mais profond) : « Chante-moi une chanson ». Persuadé de la réussite de ses projets ambitieux, prêt à relever les missions impossibles, il avait déjà créé en 2016 le premier festival du « Printemps du Jazz Persan » à Paris programmant à guichet fermé une belle brochette de jazzmen iraniens… totalement inédits dans l’hexagone. Multiculturels et multigénérationnels, dotés d’une vraie alchimie musicale, les opus d’Arshid Azarine font renaître la musique persane en réunissant jazz, tango et un zeste d’électro… parfaite harmonie entre l’orient et l’occident… l’ancien et le présent. 

Dr. Azarine, tu es un médecin spécialiste pointu et tu donnes des conférences dans le monde. Donc Arshid Azarine le pianiste de jazz est ton côté Mr. Hyde ! Parle-moi de ton background musical.

Arshid Azarine : Oui, je suis un médecin confirmé et un tout jeune pianiste de jazz. J’ai commencé le piano très jeune et j’ai continué durant mes études ; puis en 1992, j’ai monté un sextet en réunissant des jeunes toubibs enragés de jazz et, durant une quinzaine d’années, on se produisait autant que possible. En 2013, après beaucoup d’hésitations et nombre encouragements, j’ai sorti mon premier album « Persian Sketches » en piano solo et, à ma surprise, j’ai donné des concerts prestigieux accueillis partout avec enthousiasme. Donc, pour élargir et mieux présenter mes compositions, j’ai sorti en 2015 mon album « 7 Djan » (7 vies ; fondé sur le livre Conférence des Oiseaux) en trio avec le contrebassiste Hervé De Ratuld et Habib Meftah Bousheri, percussionniste et chanteur du sud de l’Iran (et compagnon de route du Trio Joubran et de Titi Robin). 

Tu ne joues que tes compositions lors des concerts en solo ?

Arshid Azarine : En ce moment oui, mais au début, j’interprétais quelques standards…iranais. À présent, la plupart de mes compositions sont rodées.

Tes pianistes de jazz préférés ?

Arshid Azarine : Nombreux. Je pense à plein de pianistes d’époques différentes. En faisant mon premier album, j’ai beaucoup écouté Abdullah Ibrahim « Dollar Brand », mais également Chick Corea, Herbie Hancock, Keith Jarrett… et oui et Ahmad Jamal, mais celui qui m’a vraiment influencé, c’est Dollar Brand.

Parle-moi de l’aspect rythmique de ta musique. 

Arshid Azarine : Dans mes compositions, je m’inspire des rythmes iraniens, souvent en 5 ou 7 temps et même 11 temps. Par ailleurs, les morceaux de Habib utilisent les rythmes 6/8 Busheri (un peu décalés).

Et ce concert monumental au New Morning prévu le 4 novembre 2019 ?

Arshid Azarine : Pour présenter mon nouvel album « Sing me a Song », j’ose amener 16 musiciens venus de Londres, Vienne, Téhéran et Los Angeles. Plus moi-même et un conteur. Ce concert, comme l’album, a pour projet de rassembler des gens de Téhéran et de la diaspora. Des générations différentes, de styles variés. Les gens d’avant et d’après la révolution et les jeunes artistes d’aujourd’hui. Ce message est adressé aux Iraniens, mais, en fait, ça touche tout le monde. C’est pour dire qu’on est ensemble. Le peuple reste soudé… peu importe s’ils habitent dans le pays où existent des diasporiques ?

Ta vedette principale Sussan Deyhim est le symbole même de la diaspora iranienne. Célèbre sur les deux côtes de USA, dans le milieu avant-gardiste depuis des décennies, collaboratrice de Bobby McFerrin… elle est une valeur sûre… mais ton répertoire pour elle… est étonnant !  

Arshid Azarine : C’est sûr que ‘Mara Bebous’ que chante Sussan Deyhim est comparable à l’Hymne de l’Amour. C’est la chanson iranienne la plus connue… et interdite depuis des décennies par tous les gouvernements. En fait, c’est elle qui me l’a demandé. J’ai dit « Oh non, pourquoi ça ? » et elle m’a dit « Je voudrais interpréter cette chanson en tango/milonga et lui donner une image inattendue ». Avec cette approche, la chanson entre dans le processus du projet. Elle va voyager de « Tehran Geles » * (L.A.) à Paris pour ne chanter que cette chanson ! *« Tehran Geles » * : les Iraniens sont la 2e minorité de Los Angeles. Au minimum 2 millions d’Iraniens y résident et surnomment L.A., Tehran Geles, le petit Téhéran.

http://arshidazarine.com

Ecrit par Sir Ali

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