Nubya García 4tet, un air frais sur le jazz. La chaleur tropicale étouffe Marseille ce soir alors que le concert Nubya Garcia Quartet programmé par le Marseille Jazz des 5 Continents s’annonce entre les murs de la Vieille Charité.
Une salve d’applaudissements bien appuyés l’accueil la Saxophoniste qui émerge de l’escalier en fond de scène. Bras nus, enveloppée dans une robe de tulles rouge sombre. “Il fait chaud vous ne trouvez pas, un ventilateur s’il vous plait” demande-t-elle ruisselante “et pour vous aussi ce serait nécessaire”. On est d’accord. On cuit ces jours-ci. Nubya Garcia est avec Lyle Barton au piano, Daniel Casimir “the Third” à la contrebasse et Sam Jones à la batterie. Son saxophone ténor brossé est posé devant elle. Musique Maestra !
La Playlist du concert nous plonge dans son univers multiculturel. A l’instar de ses illustres prédécesseurs, la compositrice raconte sans se redire. De longs morceaux à l’improvisation soignée nourrissent un jazz mystique dont le phrasé vertical rejoint un certain master plan de Pharoah Sanders. Piano, basse, batterie appuient le discours jazz, créole, urbain. Nubya Garcia dépoussière le sujet, développe ses créations sans brides. L’artiste est difficile à classer mais le jazz est là indubitablement et c’est que du bonheur.
Née à Londres la saxophoniste, compositrice et chef d’orchestre, a étudié à Camden Music sous la direction de la célèbre pianiste Nikki Yeoh. Ses bases sont solides tout comme sa détermination. L’artiste a des choses à dire et deux premiers albums pour preuve de son éloquence musicale – Source en 2020 et Odyssey en 2024 – aujourd’hui devenus des références. A 34 ans, Nubya García est considérée comme l’une des actrices du renouveau du jazz. Dans ces compositions, jazz urbain et jazz classique explorent volontiers les sonorités dub de la diaspora africaine, du R&B, de la cumbia.
A ceux qui voudrait encarter une nouvelle fois la musique jazz qu’ils continuent à réduire le champ ; nous on l’écoute avec curiosité et délectation. La musique de Nubya Garcia est dans cette conversation qui se renouvelle continuellement. Une conversation propre au jazz. Celle débutée aux premiers claps des ancêtres, métissée depuis la source, jouée dans l’instant et projetée dans un cri vers un futur proche au-delà de l’horizon.
Allumée de l’encens ! pourquoi pas ! nous dit Nubya G juste avant de nous proposer le titre Odyssey de son album éponyme. Odyssey c’est une grande histoire qui ne nous laisse pas insensible par ses lignes mélodiques, ses ondes d’énergie, l’émotion qui l’envahit dans le creux de ses notes. Nous sommes du voyage. Le piano entre les mains de Lyle Barton fleuri de propositions fluides et toniques. Le riche solo de contrebasse de the Third comme s’amuse à l’appeler Nubya ouvre d’autres espaces. Sam Jones déclenche son éventail rythmique, univers bavard et syncopé de frappes franchissant la frontière SKA en fin de programme. Le projet du quartet foisonne de passerelles imprégnées de musique actuelle marque désormais indélébile de ce jazz nouvelle génération incarnée ici par Nubya Garcia 4tet.
Les minutes filent. Tout a une fin. Les spectateurs.trices œuvrent pour un rappel . De retour le 4TET nous offre un dessert qui va rouvrir l’appétit. Le morceau plus débridée est riche de nouvelles sonorités avec des propositions électro, décomplexée des conventions dites de l’art du jazz !
Le festival de Marseille Jazz des 5 continents poursuit sa programmation à la Citadelle avec Tigran Hamasyan. Rendez-vous ensuite au Théâtre de la sucrière pour une soirée avec Ludivine Issambourg & Antonio Lizana puis à la Friche Belle de Mai le 8 juillet avec Jeff Mills et Emile Parisien 4tet . Le 9 on s’installe au Théâtre Silvain jusqu’au 13 juillet, Caravan Palace, Mino Cinelu, Sophye Soliveau, Thee Sacred Souls, Anne Paceo, Kokoro, Eric Truffaz, Dee Dee Bridgewater, Alune Wade Jocelyne Berourar…