#INTERVIEW Les Trompettes de Christian Scott

Traduction : Monique Bornstein  et J.louis Neveu

Baigné depuis sa plus tendre enfance dans l’atmosphère légendaire de la Nouvelle Orléans, Christian Scott est le digne successeur des trompettistes qui ont écrit la légende de la Louisiane. Un étrange musicien qui a transformé cet instrument parce qu’il n’aimait pas le son… de la trompette. Il était de passage à Nice dans le cadre des Nice Jazz Festival Sessions, invité par la ville de Nice et Imago Records.

Vous reconnaissez la trompette de Dizzy Gillespie mais connaissez-vous la Siren, la Sirinette ou le Bugle inversé, pour cette curiosité, il suffit d’écouter Christian Scott qui réussit selon lui à créer 6 sons différents avec chacun de ses instruments modifiés et ainsi dit-il « étirer ma musique »

Christian Scott : …Je veux dire par là qu’avec la diversité des sons que je peux avoir, ma musique peut ouvrir plus de frontières pour qu’il n’y ait plus de barrières entre les styles…l’idée est de dire musique étendue, étirée vers d’autres musiques avec une nouvelle perspective d’égalité des musiciens, des genres…l’idée, c’est de ne pas créer de divisions,ne pas dire, c’est du jazz, du hip-hop, du blues, de la musique coréenne…Il faut obtenir une assimilation de musiques qui donnent de l’émotion, qui touche et qui rapproche les gens.

Le CD « A Tunde Adjuah » ( Adjuah, le nom qu’on lui a donné aux États -Unis) évoque ses racines, ce passé pas si lointain où ses descendants, les Blacks Indians, des esclaves du 18ème siècle que l’on faisait venir de Saint-Domingue, sur la pochette, il y a une très belle photo de ces hommes revêtus de leurs plus beaux atours qui perpétuent la tradition, l’hommage à tous ces esclaves qui essayaient de s’enfuir.

C.Scott :  j’ai commencé très jeune à défiler et jouer pendant ces fêtes, c’était presque une obligation dans la mesure où mon grand-père était chef de plusieurs tribus de Blacks Indians et, encore maintenant, j’ai un oncle et un cousin qui le sont aussi…depuis, j’ai développé une partie de ma musique sur ces bases et qui a donné à mon CD Stretch Music, cette connotation dont je vous parle, de musique étirée.

 

JP Lamouroux : comment s’élaborent vos compositions ?

C Scott : Le mieux, l’idée est de mélanger tout ce que je trouve. Bien sûr, il faut garder les histoires d’harmonie, mixer les différentes musiques, contrôler la musique… qu’est-ce qui fait la musique ? Ce n’est pas une sauce que je fais, c’est une accumulation, association des musiques dans lesquelles j’entre profondément, d’abord comprendre réellement puis mixer,récupérer,assimiler.

JP Lamouroux : Dans vos enregistrements, on sent une connotation politique  très liée  à l’état de la vie sociale actuelle qu’en est-il ?

C Scott : Je connais des vieux musiciens de la Nouvelle Orléans. Nés dans les années 1930 et 40, ils furent très connus et sont maintenant dans un tel état de pauvreté qu’ils peuvent à peine se nourrir. J’ai la chance d’être d’une génération plus à l’aise, comme je les connais quand je vais à New Orléans, j’essaie de les aider.                                           

Pour mieux comprendre ce jazz du futur que prodigue Christian Scott il faut écouter la Centennial Trilogie (Ruler rebel,Diaspora et The Emancipation Procrastination) qu’il a enregistrée en 2017 en référence au 1er enregistrement de jazz en1917 par l’Original Dixiland Jazz Band .Parmi tous les titres de cette trilogie The Last Chieftain reflète bien toute la reconnaissance que porte le musicien a tous les gens de la Nouvelle Orléans et dans Diaspora il y a la découverte d’une très grande artiste, la flûtiste Elena Pinderhugues.

À la fin de cette tournée européenne, Christian Scott est rentré chez lui et a joué avec ses copains de la Nouvelle Orléans, non pas avec sa Sirinette mais avec celle qui a immortalisé ses frères aînés, Wynton Marsalis et Terence Blanchard.

                                                             

Ecrit par Jean-Pierre Lamouroux

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