Le monde est Jazz

Fruit originel d’une communauté afro-américaine aux racines multiples, le jazz porte en lui toutes les raisons de se modeler aux évolutions du temps et de s’épanouir sur d’autres territoires, hors des Etats-Unis qui l’ont vu naître. A observer ses métamorphoses et ses adaptations, la musique jazz a ouvert une infinité de voies dans lesquelles d’immenses jazzmen, mais aussi des musiciens de tous pays, se sont engagés, permettant la découverte de nouveaux rythmes et de sons toujours réinventés.

L’INFLUENCE DU SUD
C’est par un facteur géographique que débute l’aventure vers d’autres musicalités, avec la proximité du Mexique et des Caraïbes qui, par contagion, font jaillir de nouvelles sonorités : le flot d’immigrants, notamment cubains, portoricains ou dominicains, contribue à l’apparition de consonances latines dans le jazz. Le grand Dizzy Gillespie a eu un rôle majeur en jouant avec le flûtiste Alberto Socarrás ou en associant à ses créations le prodigieux conguero cubain Chano Pozo.

DizzyDès lors, le jazz se mêle à la rumba et aux rythmes afro-cubains qui feront émerger de grands percussionnistes tels que Patato Valdés, Càndido Camero ou Ray Barretto. S’envolant du côté de La Havane, la fusion Latin Jazz connaît un essor prodigieux dont les effets se manifestent encore aujourd’hui. Toutes ces musiques se regroupent sous la banderole du jazz afro-cubain se différenciant de la Bossa Nova, un  jazz aux accents de samba apparu du côté du Brésil.

raybarrettoRETOUR AUX SOURCES
Dans les années 60, une partie de la communauté des musiciens afro-américains entend remettre l’Afrique au centre de la création. Une musique de révolte se fait entendre tandis que se développe une prise de conscience face à l’étendue de la richesse de leur culture ancestrale. Le batteur Art Blakey s’inspire largement des percussions africaines tandis que Mulatu Astatke conçoit l’éthio-jazz en fusionnant musique traditionnelle éthiopienne et jazz.

mulatu-astatkeL’Afrique du Sud, en plein apartheid, devient un lieu phare en matière de création pour le jazz africain : la situation politique, extrêmement tendue, teinte la musique d’un engagement dont Hugh Masekela est le principal représentant. En différents points de l’Afrique, les musiciens introduisent des accents jazz à leur pratique traditionnelle : désormais la kora, le djembé ou le balafon trouvent une place légitime dans les festivals de jazz.

Hugh MasekelaJAZZ SANS FRONTIÈRES
A la recherche de nouvelles expériences, certains musiciens comme John Coltrane ou John McLaughlin partent au bout du monde afin d’enrichir leurs compositions. C’est en Inde qu’ils trouvent une autre façon de faire sonner leur jazz. Tout en conservant leur propre personnalité, ils s’inspirent d’éléments traditionnels comme le Râga pour donner des tonalités tout à fait inédites à leurs créations. Le sitariste indien Ravi Shankar joue un rôle essentiel dans la liaison entre ces deux cultures au point que John Coltrane lui rende un poignant hommage en appelant son fils Ravi. Ces mélanges de textures musicales se sont définitivement inscrits dans la grande histoire du jazz offrant de nos jours une pluralité d’émotions. Les frontières entre les genres sont tombées permettant une infinité d’alchimies, à l’exemple d’Ibrahim Maalouf qui apporte à sa trompette de divines sonorités orientales. La musique offre de bien belles rencontres que la société devrait méditer.

maalouf

Ecrit par Valérie Juan

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