#Interview : Big Band Les Cheffes à la Baguette

Toutes générations confondues, la musique de jazz interprétée par un Big Band provoque un bel enthousiasme de la part du spectateur qui machinalement tape du pied sur la musique.

Mais depuis les années 60, ce style de formation s’est réduit à peau de chagrin, faute de pouvoir, pour un organisateur de concerts inviter 10 à 15 musiciens. Il reste aux aficionados de rêver en pensant aux décennies précédentes où les grandes formations étaient l’un des piliers du jazz, où souvent les célèbres instrumentistes tenaient la baguette et accompagnaient les chanteuses et chanteurs de renom, aussi bien du jazz que de la variété. Bref, il faudrait des pages et des pages afin d’évoquer cette belle histoire. Elle se poursuit de nos jours d’une façon plus sporadique, dans les universités américaines, dans divers pays au sein de corps d’état comme l’armée, et en france quand les professeurs de Conservatoire et des musiciens de petites formations se rassemblent pour un concert ou un enregistrement. Un bon exemple : dans le cadre de la 3e édition de Jamin Juan en octobre dernier 3 big bands avaient été invités grâce à l’aide financière de la SACEM, deux d’entre eux étaient dirigés par deux Cheffes : Tullia Morand et Line Kruse.

Tullia Morand

Tullia Morand : C’est toujours formidable de pouvoir réaliser une passion, réussir ce pari de jouer avec 13 musiciens tous eux-mêmes à la tête de petites formations. Si j’enlève le côté physique de prendre et reprendre mon baryton saxophone, il y a un regain d’adrénaline, parce qu’au final, mon travail en amont de composer et d’arranger doit en une heure de temps se finaliser ; je dirais même, d’un regard avec les musiciens (sourire). Il y a à chaque morceau un bonheur d’avoir pu choisir des musiciens dont la sonorité me touche, et en plus chacun est capable de tenir un solo, ce qui m’ouvre un éventail de sonorités musicales dans mes compositions.

Comment composez-vous ?

Tullia Morand : Je travaille le chant et le piano, souvent en regardant un film, une petite musique m’interpelle, je pense à une ambiance, je commence à composer d’abord pour un trio puis pour un quartet… de nos jours le big band prend des formes différentes selon la volonté du directeur. On trouve désormais des instruments moins connus, la harpe, un ensemble de cordes, moi-même j’ai arrangé pour Fabien Ruiz danseur de claquettes… ce métier est magique, toutes les formes et formules sont permises.

www.tulliamorand.com

Pour l’autre Cheffe, la violoniste danoise Line Kruse, la vocation est venue d’une différente façon, comme celle de diriger ses 17 musiciens.

Line Kruse : J’avais envie de faire un disque, je me suis dit aussi simplement, pourquoi pas avec un big band… dans un même temps en arrivant en France, j’ai rencontré de nombreux musiciens d’Amérique latine, ça a été le déclic. Quant à la direction, c’est parfois difficile de jouer et de diriger, mais après avoir appris ce métier on progresse, moi je joue beaucoup sur chaque morceau je donne le ton, le rythme, et me force pour que les musiciens jouent sans me voir lever le doigt… il faut dire que j’ai beaucoup de chance de pouvoir m’entourer des meilleurs solistes du moment.

Comment travaillez-vous ?

Line Kruse : Je n’ai pas de moments bien définis, il y a un déclic en fredonnant, en pensant à un événement, un voyage ou une rencontre, mais depuis que je dirige, je commence à placer dans ma tête les soufflants, le piano, la batterie, bref je fais une orchestration mentale et après je bosse sérieux pour mettre tout en place… c’est très important de comprendre chaque instrument, car mal placé, il peut déformer votre composition initiale… le big band c’est un vrai dialogue, vous rendez-vous compte ? Je peux faire répondre les violons aux saxophones ou les trompettes à mon violon (rires)… un vrai bonheur.

Désormais nos deux Cheffes font partie de cette nouvelle génération inventive d’un mélange instrumental que l’on voyait peu. dans l’écriture Tullia Morand a co-signé plusieurs films et Line Kruse a commencé à enregistrer son dernier album Invitation avec des cordes à paris et finaliser le projet au son des rythmes des Caraïbes à Cuba.

Alors on y croit !!! Les Big Bands pourraient être de retour !!!

www.linekruse.com

Ecrit par Jean-Pierre Lamouroux

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