#Interview : Thierry Maillard « Zappa Forever »

Le pianiste Thierry Maillard a débuté sa carrière discographique en 1998, avec John Patitucci et Dennis Chambers. « Musicien et compositeur sans limite ni frontière », comme il aime à se décrire, il s’est lancé dans l’aventure du big band en 2018 avec l’album « Pursuit of Happiness ».

On le retrouve, cette année, à la tête d’un orchestre encore plus important, 23 musiciens dont 9 invités pour ce nouveau projet nommé Zappa Forever chez Ilona Records.

Vous êtes pianiste, accordéoniste, compositeur, arrangeur, chef d’orchestre. Comment aimez-vous vous présenter ?

Thierry Maillard : J’ai joué de l’accordéon quand j’étais plus jeune pendant plus de dix ans, c’est là que j’ai rencontré Richard Galliano, mais aujourd’hui je suis plus pianiste et compositeur.

Comment est né ce projet Zappa Forever ? On précisera que toutes les compositions de l’album sont de votre plume.

Thierry MaillardL’idée était de rendre hommage à Frank Zappa avec un big band parce que sur la fin de sa vie, et même avant, il a composé et arrangé sa musique pour des grands ensembles, malgré les réactions de la presse ou d’une partie du public. Il avait envie d’orchestre, peu importe ce que ça allait coûter. De mon côté, c’était un peu ça, faire un disque avec 23 musiciens, c’est un projet un peu fou, financièrement aussi, mais cela correspond à l’idée que j’avais de Zappa. Mais cela reste un hommage très personnel. C’est aussi pour cela que l’album est double, à l’époque on pouvait faire 90 minutes de musique, cela ne dérangeait personne. Avec des titres de 12 à 15 minutes. Je n’ai pas fait un album pour passer à la radio ou pour avoir des tubes.

À part un solo et quelques phrases mélodiques, votre rôle dans ce disque est surtout l’assise rythmique avec Yoann Schmidt & Hadrien Féraud ?

Thierry MaillardOui, c’est en ça que je suis le chef d’orchestre. Je suis là pour mettre la couleur du piano, mais le principe est de mettre en avant les solistes. J’ai fait un solo, mais j’aurais pu m’en passer. Les musiciens de l’orchestre ont un peu insisté pour que j’en fasse au moins un. Ce n’était pas le but. Mon rôle c’était, l’écriture, monter le projet.

Un tel Big Band ne doit pas être facile à produire et à faire jouer sur scène, les organisateurs peuvent être frileux ?

Thierry MaillardPour les organisateurs, je ne sais pas trop encore. La sortie du disque physique a été repoussée au 19 juin 2020. Il va y avoir des articles, mais c’est aussi aux organisateurs de s’y intéresser. Dans l’univers du jazz actuel, il n’y a pas d’autre big band qui joue ce genre de chose. Quand on voit le nombre de trios, quartets, quintets qu’il y a, c’est important qu’il y ait aussi un orchestre comme celui-là. C’était super de réunir autant de musiciens, d’invités. Il n’y a pas de re-recording, tout le monde est venu chez Philippe Gaillot, dans son studio à Pompignan (Gard). C’était aussi un évènement humain incroyable et chaleureux. Ce n’est pas juste un album enregistré par des gens qui viennent et qui rentrent chez eux le soir. On a tous vécu ensemble pendant 10 jours. On mangeait ensemble matin, midi et soir. Peut-être un peu comme, on se l’imagine, les groupes de Zappa dans les années 70

Avez-vous prévu, comme zappa l’a fait en son temps, des arrangements pour une version Low Budget Orchestra, si vous n’aviez pas d’engagements pour le big band au complet ?

Thierry MaillardOui, bien sûr. Je l’avais déjà fait pour Pursuit of Happiness. Il y a une version ultra light où on peut faire le projet à huit musiciens, plus un invité.  Mais comme je le dis souvent, ce big band à vingt musiciens ne coûte pas plus cher qu’un quartet américain. C’est super de faire venir des stars, mais quand on voit ce que cela coûte, des fois on se dit: bon…

Y a-t-il d’autres musiciens dont vous revendiquez l’influence parmi les pianistes, parmi les chefs d’orchestre ?

Thierry Maillard(Réponse instantanée) Le premier ONJ d’Antoine Hervé. On peut dire qu’il m’a influencé, c’est une évidence. J’avais 22ans la première fois que j’ai entendu ça. Cela m’a donné envie de composer puis d’écrire pur un grand ensemble. Antoine Hervé est un des meilleurs orchestrateurs en France au-delà même du pianiste génial qu’il est. Son ONJ était fabuleux.

Pour conclure, vous étiez avec votre précédent album en big band à la poursuite du bonheur, est-ce que vous vous en êtes rapproché, avec celui-ci ?

Thierry MaillardAh oui, carrément. Du coup, je ne sais pas si je referai un album en big band, pour moi cela serait de la redite. Ou alors, il faudrait que cela soit totalement autre chose. Pursuit of Happinness, c’était l’entrée et le plat, avec Zappa Forever, j’ai mis le dessert, le vin. J’ai complété le tout. On dit souvent, jamais deux sans trois, mais dans cet esprit je m’arrêterais au deuxième. Il n’est pas impossible que je revienne aux cordes, un jour, ou que le m’essaye aux voix. On verra ! Pour le moment, j’ai celui-là, que j’espère faire tourner jusqu’à fin 2021 voire 2022. Il y aura aussi le trio avec Dédé Ceccarelli et Thomas Bramerie. (Album prévu pour avril 2021 chez NoMad Music) Mais entre Pursuit et Zappa, il y a de quoi faire vivre le big band pour le plus grand nombre, en live.

www.thierrymaillard.com

Ecrit par Jacques Lerognon
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