Le vagabond, c’est un guitariste de blues, un guitariste de jazz qui, au début du roman, joue pour quelques jours dans un club d’une ville sans nom.
Il joue pour vivre, il joue pour respirer, il joue parce que sa guitare est désormais sa seule béquille. « L’homme n’avait qu’une envie : rejoindre le rade de la rue des Martyrs et gratter les cordes et s’y pendre sans jamais manquer d’oxygène. Six cordes d’acier qui cisaillaient chaque nuit de joie et de douleur ce qui se trouvait en germe dans ce ventre de bois et dans ses doigts impatients »
On ne sait pas grand-chose de ce vagabond des villes, Franck Bouysse l’appelle « L’homme » avec un simple petit h. Il joue, il boit, parfois il dort. Il erre aussi dans les rues, entre le petit club pas terrible et son hôtel carrément minable. Il joue pour une femme qu’il a aperçue dans ce club, il joue aussi pour une autre femme qui l’a quitté, une femme qu’il voit partout, une femme qu’il voudrait reconquérir. Un court texte de 115 pages, au cours desquelles, Franck Bouysse nous distille, au gré des détours et des accords du guitariste, quelques informations sur cet homme, ce vagabond des villes, qui nous permettront de le comprendre, de le suivre, le temps d’un set, le temps d’un verre, le temps d’un chagrin. Car dans la vie, il n’y a pas que les bluesmen qui s’assoient à un carrefour, un crossroad, pour espérer voir le diable. Et si le diable du vagabond était une femme ?
En fait il faudrait, si on était musicien, avoir l’idée d’un petit riff, de trois accords et d’en faire un long talkin’ blues.
NB : la guitare qui sert d’illustration sur la couverture est le prototype d’une Les Paul Black Beauty, destinée à Mr Les Paul lui-même en 1954