Ces dernières années l’Oud a pris une place prépondérante dans le jazz, engagé dans de multiples projets et pas des moins prestigieux !
Le clou du concert de Wynton Marsalis au Festival Jazz in Marciac en 2017 est l’intervention de l’oudiste Kurde Naseer Shamma.
Aussi Avishai Cohen enregistre et tourne avec l’oudiste Israélien Amos Hoffman,
et cet été 2018, Dhafer Youssef, reçoit un accueil explosif du public au Festival Jazz à Juanet au Festival Jazz in Marciac.
Célébrons les 60 ans de l’arrivée de l’Oud dans le vocabulaire du jazz.
En 1958, Ahmed Abdul Malik, bassiste de jazz (collaborateur de Monk, Coltrane, Blakey et Randy Weston) introduit officiellement l’Oud dans l’univers du jazz, avec son tout premier album, édité par le célèbre label Riverside.
Né Jonathan Tim Jr, à New York, il revendique ses racines soudanaises, change de nom, de religion, intègre l’Oud et sort l’album Jazz Sahara où se mélangent jazz et musiques Arabo-Africaines. Avec ce disque et les cinq suivants, il impose l’instrument et son style sur la scène musicale, avant-gardiste américaine.
Dans la culture arabe, le Oud est «l’instrument roi», Il est le prolongement des cordes vocales et accompagne les grandes voix arabes et arabo-andalouses Instrument très ancien, il trouve ses origines dans les montagnes entre l’Iran et l’Azerbaïdjan, pré islam. Au fil des siècles l’instrument évolue et radie sur l’ensemble du bassin de la méditerranée (ayant traversé l’Empire Ottoman et les pays arabes). Cet instrument à 11 cordes (3 basses et 4 en double) est probablement l’ancêtre de la guitare et sans doute la V.O. du luth européen.
Dans années 70, sous l’impulsion du grand oudiste Irakien Munir Bashir, l’Oud décroche la place d’instrument soliste et révèle des capacités d’improvisation incroyables. À vrai dire Munir Bashir a donné à l’Oud ses lettres de noblesse, tout en l’affranchissant de ses carcans. Dès lors il devient universel surtout dans l’univers jazz, où l’improvisation est la première règle du jeu. La rencontre entre jazz et proche orient est désormais consommée.
Le précurseur du « Jazz Oriental » est Fawzy Al-Aiedy, aussi compatriote de Munir Bashir. Il s’installe à Paris en 1973 et rapidement lance son projet L’Oriental Jazz et ouvre ainsi l’ère de l’Oud dans le jazz, dynamique depuis une quarantaine d’années à partir de l’Europe.
Rabih Abou-Khalil est parmi des fondateurs et reste un des représentants le plus aventureux et excitant de ce mouvement planétaire. Ce génie originaire du Liban est un extraordinaire soliste, qui compose dans tous les registres, tout en exprimant un sens de l’humour acéré. C’est en 1981, pendant la guerre civile qu’il émigre de Beyrouth à Munich et c’est là que va commencer sa carrière discographique avec 23 albums produits sous les meilleurs labels de jazz Allemands (ECM, ENJA, MMP). C’est avec deux artistes tunisiens, Anouar Brahem et Dhafer Youssef, que le « Jazz Oud » touchera le sommet.
À partir de 1991, ECM le label de jazz européen le plus réputé, dévoile son oudiste de choix, Anouar Brahem et réussit même à y convertir les Ayatollahs du jazz, avec sa musique poétique, sobre et ancrée dans les normes du jazz et ses connivences avec les chefs accordéonistes ; Richard Galliano et Jean-Louis Matinier.
L’autre vedette incontournable de « jazz oud » est Dhafer Youssef. Il capte un public plus large et plus jeune. Doté d’une voix et d’une technique de chant exceptionnelle, mystique et énergétique.Il crée une ambiance « Ethno jazz et World fusion » aux accents « d’Electro Soufi ».
Agile, flexible et performant l’oud est un instrument différent, dans les mains de chacun de ses maîtres exactement comme une guitare. Quelles que soient les différences, de style, d’instrumentation, d’influences, Jazz, blues, musique Africaine, Flamenco; musique ancienne, moderne, ou fusion, intimiste ou orchestrée.
À présent, la boucle est bouclée avec Sandcatchers, issu du même Brooklyn que celui ayant bercé Ahmed Abdul Malik,. Yoshi Fruchter, leader et oudiste du groupe est un collaborateur de longue date de John Zorn. Autour de l’Oud, il compose une forme impensable de musique, mêlant jazz avant-gardiste New-Yorkais aux atmosphères du Moyen-Orient et aux sonorités « d’Americanda ». Une formule musicale typiquement nord américaine qui repose sur une section rythmique jazz et une « lap steel guitar » qui dialogue harmonieusement avec l’Oud. C’est d’ailleurs dans la musique juive nord-africaine de ses ancêtres que Yoshi Fruchter puise toute son inspiration !!!
L’oudiste du jazz Niçois est Khaled Ben Yahia, Tunisien d’origine, et aussi prof de musique orientale au conservatoire de Nice, qui se produit avec le pianiste de jazz Jean-Paul Alimi au sein du groupe Rose à Malice.
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