Un film sur le jazz : « Respect »

Le jazz et ici sa cousine germaine, la soul music, ont donné lieu récemment à plusieurs biopics. Billie Holiday, Ma Rainey, Chet Baker, Miles Davis ont inspiré récemment les cinéastes. Un nouveau venu, vient de s’ajouter à la liste « Respect » de Liesl Tommy, réalisatrice sud-africaine dont c’est le premier long métrage, et disons le tout net, pour un coup d’essai, c’est un coup de maître.

Basé sur la première partie de la vie d’Aretha Franklin (jusqu’à 1972), nous explorons les drames, les angoisses, et aussi l’incroyable talent de cette jeune femme surdouée, née dans une famille baptiste de Detroit, Michigan, et qui biberonne du gospel et du jazz dès sa plus tendre enfance. Art Tatum est un ami de son père, le Révérend C.L. Franklin, (dont le rôle est tenu par  le fabuleux Forrest Whitaker, amaigri mais impérial) et enseigne à Aretha les rudiments du piano, qu’elle maîtrisera très vite. Quant à la voix, elle est d’ores et déjà extraordinaire.

Dans ces années soixante, la jeune Aretha arrive à maturité alors que le pays rentre dans une période de bouleversements. Le Révérend Martin Luther King, un autre ami proche de la famille, prépare sa fameuse « Marche sur Washington » et Aretha s’engage à ses côtés. Les droits civiques seront désormais pour elle une priorité. Mais sa carrière n’attend pas, et Aretha est admise chez Columbia, sous la férule du fameux producteur John Hammond, qui avait déjà découvert Bessie Smith et Billie Holiday. Il veut en faire une chanteuse de Jazz, et l’appuie dans cette direction, Hélas, Aretha n’est pas à l’aise avec le répertoire de Broadway, et c’est grâce à un autre producteur, Jerry Wexler, qui vient de fonder le label Stax Records que Aretha va trouver sa vraie voie, celle de la SOUL, ce mélange de jazz, de blues et de gospel qui lui convient à merveille. De là  s’ensuivent les succès planétaires, les tournées mondiales, mais aussi les mariages malheureux, les dépressions, l’alcoolisme… Un retour aux racines du gospel et à l’église baptiste lui rouvriront les portes de la félicité.

Un mot de l’interprétation : Jennifer Hudson est tout simplement fabuleuse, et mérite largement sa nomination aux Oscars : Elle donne une profondeur tragique au personnage, sans jamais forcer la note, et arrive à nous faire rire, nous énerver ou nous émouvoir… (les scènes de la mort de sa mère ou celle de l’annonce de la mort de Martin Luther King tireraient des larmes à ses pierres…). Elle ne joue pas Aretha, elle la VIT ! Une performance incroyable.

En bref, un film que les passionnés de la « note bleue » se doivent de voir toutes affaires cessantes, et qui trouvera plus tard sa place aux côtés de « Round Midnight », « Ray » ou « Bird » parmi les grands films consacrés à cette musique que nous aimons tant, qu’on l’appelle jazz, gospel, blues ou soul. « It don’t mean a thing if it ain’t got that swing »…

Ecrit par Gilbert D'Alto

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