Une soirée éclectique en ce 13 juillet puisque les spectateurs auront pu écouter au Jammin summer session, de beaux hommages à Haendel ou bien Schubert grâce au Mark Priore trio, au Grateful Dead avec le sextet des frères Belmondo pour terminer avec le meilleur du jazz américain actuel en compagnie du quartet de Chris Potter.
À 19h30 précises commence la traditionnelle Jammin Summer Session avec le Mark Priore trio : le pianiste Mark Priore s’est entouré d’une section rythmique composée de Juan Villarroel à la contrebasse et Elie Martin Charrière à la batterie. Ces jeunes musiciens nous égrènent des morceaux du projet Initio, qu’ils ont enregistré ensemble : références multiples à l’histoire de la musique puisque au fil de morceaux comme Océan, Orphée et Eurydice ou encore Adagio, se mélangent ornementations baroques chères à Haendel, les notes de Shubert et le phrasé si caractéristique au piano d’Ahmad Jamal. Une belle cohésion pour ce trio dont on sent sur scène la complicité et les références communes.
La référence – et quelle référence ! – est unique pour le projet Belmondo Deadjazz qui entame la soirée à la pinède Gould. S’emparer des morceaux du Grateful Dead, groupe mythique pour les réinterpréter, les réinventer. Une gageure mais une réussite totale pour Lionel Belmondo au saxophone et son frère Stéphane Belmondo à la trompette
qui se sont entourés d’excellents musiciens : Éric Legnini au Fender Rhodes,
Thomas Bramerie à la contrebasse, Laurent Fickelson à l’orgue et au piano et Dré Pallemaerts à la batterie.
China Cat Sun Flower pour commencer; les claviers vintage de Legnini et Fickelson font merveille pour distiller subtilement la ligne mélodique du morceau.
Puis la trompette de Stéphane Belmondo réinvente la mélancolie et le blues dans le magnifique Stella Blue, l’on entend presque sourdre la voix de Jerry Garcia à travers les notes toutes douces de Thomas Bramerie,
le saxophone inspiré de Lionel Belmondo, le tempo du batteur. « Un ange brisé chante à partir d’une guitare ». Pas de guitare sur scène, mais des anges sûrement. La nuit tombe doucement, l’on sent le trompettiste ému quand il appelle sur scène pour le dernier morceau Brad Mehldau, qui, dit-il, écoutait religieusement le groupe californien il y a trente-cinq ans. Un dernier morceau pour se rappeler de cette époque tout en appréciant la novation et l’inventivité du projet.
Après l’entracte, Chris Potter a choisi des musiciens d’exception pour nous présenter son dernier album Eagle’s Point. Johnathan Blake à la batterie, John Patittucci à la contrebasse et Brad Mehldau au piano : un groupe qui va enthousiasmer le public pendant plus d’une heure. On est ébloui par le talent de chacun des interprètes mais peut être encore plus par l’humilité de chacun d’entre eux que l’on sent à l’écoute des autres. Comment ne pas remarquer la patte du contrebassiste qui débute deux des morceaux, avec une tonicité et une vivacité étonnantes. Comment ne pas s’étonner du toucher délicat des baguettes de Johnathan Blake aux cymbales curieusement assemblées, baguettes qui peuvent tout aussi bien s’envoler et se démultiplier avec éclat lors d’un solo remarquable. Quant aux mains de Brad Meldhau, elles racontent chacune une histoire pour mieux enchanter ses solos. Chris Potter au ténor, tout en retenue, accompagne, dirige, subtilise parfois la parole à ses amis virtuoses pour des solos chaleureux, quelques chorus inspirés. Un set tout à la fois aux sources du jazz, aux accents coltraniens, mais aussi moderne et inspiré.
Crédit Photos : Jacques Lerognon