#Portrait : Jean-Luc Danna

Il était plus que temps pour le Jazzophone de faire le portait du « papa du jazz niçois » comme l’a surnommé le jeune pianiste Adrien Brandeis, sur la scène du Nice Jazz Festival le 20 juillet dernier. L’accordéoniste niçois Frédéric Viale avait d’ailleurs lui aussi salué une heure auparavant, le légendaire batteur, percussionniste, bassiste mais aussi scatter à ses heures Jean-Luc Danna.

Né dans l’arrière-pays niçois au milieu des années cinquante le jeune Jean-Luc commence tout d’abord la musique par le biais de l’accordéon qu’il découvre dans un bal de village, et qui le fascine. Par chance une amie de sa mère est professeur de piano et d’accordéon, et le jeune homme de 11 ans va rapidement se familiariser avec l’instrument jusqu’à rejoindre, vers l’âge de 15 ans les orchestres de bal de la région. Il y découvre la batterie par l’entremise de Jean-Louis Russo, et sa décision est prise : il sera batteur ! 

Il rejoint donc le Conservatoire de Nice, et la classe de M. Carré, tout en jouant dans les bals avec le saxophoniste Jeannot Ricci, le contrebassiste JM Tombal, et le pianiste Daniel Goyone. Avec eux il découvre la musique de Miles Davis, de Clifford Brown, de Coltrane qui tous le passionnent. Il fréquente également le guitariste Franck De Luca, le pianiste Pierre Franzino, le bassiste Bunny Brunel, l’accordéoniste Richard Galliano

Avec eux, il pratique l’improvisation libre, dans l’esprit du free et de la fusion. Il se passionne également pour la soul music et le rhythm & blues, celui de Stevie Wonder ou Aretha Franklin qui sont pratiqués dans la région par le groupe Les Piranhas dans lequel brille le batteur anglais Steve Ferrone qui deviendra une star internationale (avec Average White Band Quincy Jones, Eric Clapton, Chaka Khan, etc) et qui reste l’une des influences principales de Jean-Luc Danna qui accompagne alors le chanteur Sauveur D’Antonio. Il découvre à la même époque le jazz africain avec les enregistrements du trompettiste Hugh Masekela.

À l’âge de 20 ans, notre héros se décide à tenter l’expérience parisienne, car ses amis Goyone et Brunel sont également dans la capitale, et les trois hommes vont partager un appartement. Néanmoins, l’expérience se révèle peu probante, et lassé d’accompagner des chanteuses de variété, Jean-Luc revient à Nice où il fait équipe avec Barney Wilen, star du jazz français et ancien accompagnateur de Miles Davis. Il accompagne également le duo brésilien Les Étoiles, et beaucoup d’artistes issus de cette communauté comme Marcia Maria, Nina Papa, etc.

Toujours ouvert d’esprit et curieux de tout, il fait également équipe avec le guitariste manouche Angelo De Barre auquel le lie une grande amitié. Il collabore alors avec toute la scène régionale et ses grands noms, Dédé Ceccarelli, Jean-Marc Jafet, Jean-Marie Ecay, Bibi Rovère, François Chassagnite, Fred D’Oelsnitz, Jo Kaiat et bien d’autres comme Roland Ronchaud ou Frédéric Viale avec lequel il partage le goût de la valse musette.

Il multiplie aussi les expériences, comme d’accompagner au Mali le maître de la kora Toumani Diabaté, chez qui il retrouve la même intensité que chez Coltrane ou Wes Montgomery, ou au Sénégal accompagnant à la basse Souleymane Faye, poète et chanteur « le Bob Dylan sénégalais » avec le percussionniste Taffa Cissé. Il collabore aussi, dans un autre registre avec le contrebassiste américain Barre Phillips, ancien accompagnateur dOrnette Coleman, dont la musique voyage entre free-jazz et musique contemporaine. Il enregistra et tourna avec Alan Stivell.

Fort de toutes ces expériences, Jean-Luc Danna, dont la référence ultime en musique reste son ami disparu l’organiste Eddy Louiss, cite dans son panthéon personnel Ahmad Jamal, Miles Davis, John Coltrane, Wes Montgomery, Max Roach & Clifford Brown et Airto Moreira comme références majeures. Lorsqu’interrogé par le Jazzophone sur sa vision du jazz, il cite en premier l’importance de l’intégrité et du refus des concessions et de la facilité.

Cet homme affable et souriant souvent vêtu à la façon africaine et qui est facile d’abord et sans aucune trace d’ego malgré son parcours à la fois atypique et exemplaire, se plait à dire que sa première récompense après un concert, bien avant le cachet, est le sourire sur le visage des spectateurs et la joie qu‘il a pu leur transmettre en jouant, afin qu’ils repartent plus heureux qu’à leur arrivée. Toujours disponible pour aider et conseiller les jeunes musiciens, voire les accompagner, Jean-Luc Danna est un plier de la musique improvisée dans notre pays.

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Ecrit par Gilbert D'Alto
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